Sarah Bernhardt

Publié par Agnesb62 le

La première fois que j’ai entendu parler de la Dame, c’était en 1977. Ça ne nous rajeunit pas… Surtout moi. Cette année-là, j’en étais à ma troisième année de spectatrice au « Français ». Il faudra que je vous raconte ce pan entier de ma vie, la découverte du théâtre au travers de cette institution qu’est la grande salle de la Place Colette.

francis huster lorenzaccioMais revenons à Sarah. En 1977, Francis Huster revisitait depuis déjà quelques mois Lorenzo de Médicis dans le Sarah bernhardt lorenzaccioLorenzaccio d’Alfred de Musset, mis en scène par Franco Zeffirelli, ancien assistant du maître Luchino Visconti. Dans le programme, à moins que ce ne soit dans un article de presse, j’appris donc que Sarah Bernhardt avait créé le rôle en 1896 au théâtre de la Renaissance, fidèle à la tradition des rôle travestis, comme elle le fit également en 1900 pour l’Aiglon d’Edmond Rostand en interprétant le rôle du duc de Reichstadt.

 Je savais également qu’on la tenait pour une des « grandes » du théâtre. Victor Hugo l’appelait « la voix d’or », jusqu’à Cocteau qui inventa pour elle l’expression « monstre sacré ».

Et puis, voilà de cela quelques semaines, j’eus la bonne surprise de me voir offrir ses mémoires par les Editions L@ Liseuse.

Lire des biographies ou autobiographies ne m’intéresse pas nécessairement… Sauf quand le sujet principal est intriguant ou intéressant, sur les plans artistiques, politiques ou sociétaux d’une époque. Que l’on ait été admirateur ou détracteur de la Dame – je parle évidemment de ses contemporains, aujourd’hui cela n’a plus vraiment de sens d’être d’un côté ou de l’autre –, il faut admettre que l’empreinte mémorielle qu’elle a laissée perdure encore, à l’instar peut-être d’un Sacha Guitry et demain d’une Maria Callas.

Sarah bernhardt 1Je me suis donc plongée dans son récit, pas certaine d’aller jusqu’au bout, mais sans aucun apriorisme. Surprise malgré moi, je me suis attachée à l’héroïne, même si elle ne m’a pas été toujours sympathique. Voilà une forte personnalité, libre et résolue à vivre sa vie sans entrave, indéniablement moderne, faisant fi des conventions et des règles. Dans un monde avant tout masculin, elle a su imposer sa beauté si particulière – chevelure crépue et traits aigus, maigreur et petite taille –, et son caractère égocentrique, fidèle et attachant. Elle n’a jamais fait que ce qu’elle voulait. D’abord tentée par le mysticisme, elle s’est vue religieuse, avant de devenir comédienne, d’entrer à la Comédie Française dont elle est renvoyée pour avoir giflé une Sociétaire. Durant le siège de Paris en 1870, elle crée un hôpital de campagne à l’Odéon. Rappelée au Français, elle en démissionne avec éclat et part à l’aventure pour une longue tournée aux États-Unis, récoltant gloire et succès là où ses adversaires lui prédisaient déroute et ruine.

Du coup, le titre de l’ouvrage n’est pas vraiment à la hauteur du contenu. Ma double vie… Double ? Sarah plaisante !Sarah  Bernhardt 2 Triple ! Quadruple ! Voire quintuple ! Actrice, peintre, sculptrice, sans doute un peu courtisane, plus tard directrice de compagnie et propriétaire de théâtre, cette femme a fait bien davantage qu’être simple comédienne. Certes, le récit ne dit rien de sa vie privée, et si elle eut un fils à 20 ans, le nom du Papa est tu. Finalement, cela n’a que peu d’importance. Peut-être madame Bernhardt a-t-elle voulu se montrer discrète et ne pas porter préjudice aux amants qui durent jalonner sa vie.

Une autre bonne surprise, outre le contenu, est sa forme, notamment sa langue et le style du récit. Sarah Bernhardt n’a rien à envier aux auteurs qui lui proposèrent des textes. Le rythme est soutenu, les anecdotes croustillantes et la peinture de l’époque à la fois précise et colorée. Et même si l’objectivité n’est sans doute pas son fort, n’est-ce pas le propre de bien des autobiographes, en règle générale ?

fortin sarah bernhardtLe seul bémol ? L’ouvrage ne va pas jusqu’au bout de sa vie. Je suis donc restée un peu sur ma faim… Moi qui rêvait de la lire décrire Belle-Ile-en-Mer où un musée lui est consacré. En effet, elle y possédât fortin, villas et manoir, qu’elle revendit un an avant sa mort.

Je terminerai en rappelant sa devise… Quand même ! Ceci pour bien montrer son aplomb et son goût de l’irrévérence.

couv ma double vie

 Sceau Sarah Bernhardt


Agnesb62

Autrice, romancière, romans historiques, romans policiers, nouvelles, essais sur les compositrices

0 commentaire

Elisa · 19 janvier 2015 à 18h53

Je ne lis pas de biographies mais j’avoue que ta chronique m’a donné envie. D’autant que j’ai visité son domaine à Belle-Ile. Envoûtant…

    agnesb62 · 20 janvier 2015 à 20h28

    La première moitié du livre peut paraitre un peu long, mais à partir de son début de carrière, avec les deux épisodes de l’hopital de guerre en plein Odéon, puis le voyage outre-Atlantique, ça « déménage »… ! 🙂

Guy · 20 janvier 2015 à 20h09

Je n’aime pas cette diction mais il s’agit d’une époque et de toute façon cette femme était hors du commun ; faisant sa sieste dans un cercueil , traversant le monde pour se produire oui on peut parler d’un destin , d’une vie hors norme.
Mais je ne dirai pas que l’acteur aussi bon soit peut être  » à la hauteur  » de l’auteur ( Edmond Rostand par exemple ) ? est-ce seulement comparable…
Je connais bien Arnaga la demeure musée de l’écrivain ou se rendait souvent la belle Sarah
c’est un très bel endroit .
Belle-Ile me tente 🙂 j’ai vu un blog magnifique sur le fort

    agnesb62 · 20 janvier 2015 à 20h27

    Belle Ile est un lieu magique, comme beaucoup d’îles en Bretagne, surtout hors saison ! 😉
    Quant à la diction de Dame Sarah, évidemment, cela n’a rien à voir avec celle de nos contemporains, et ceux-ci pourraient parfois lui envier une certaine clarté dans l’expression…
    Enfin, il n’était pas question pour moi de comparer l’auteure Bernhardt à Hugo ou Musset (je suis moins « fan » de Rostand », simplement de dire que son style est plus qu’honorable, vivant, original et riche.

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